dimanche 7 mars 2010

Quelle justice pour les victimes de Flash Ball ?

Deux ans, trois mois et quelques jours

Le 27 novembre 2007, Pierre, un lycéen de 17 ans, fut la victime, à Nantes, d'une agression (tir de flash ball au visage) dans laquelle il perdit l'usage de son œil droit.

Deux ans, trois mois et quelques jours après les faits, la presse nous apprend, avec la plus précautionneuse des circonspections, que l'enquête est arrivée à son terme et que le présumé responsable direct de la blessure de Pierre, jusqu'alors entendu en qualité de "témoin assisté", vient d'être mis en examen pour "violences volontaires avec arme par personne dépositaire de l'autorité publique".

On peut en conclure, provisoirement, que les investigations ont été menées sans confondre vitesse et précipitation, et que le principe de présomption d'innocence a été scrupuleusement respecté.

Il faut préciser que l'agresseur présumé de Pierre est un membre des forces de l'ordre, porteur ce jour-là d'un "super flash-ball", alors "en cours d'expérimentation", dont il aurait fait usage, devant le rectorat de Nantes, en direction d'un groupe de lycéens manifestant contre le projet de loi relatif aux libertés et responsabilité des universités (LRU).

Si la plupart des membres de la confrérie journalistique brode laconiquement sur la même dépêche, le/la rédacteur/trice de France-Soir, notre "grand quotidien national", fait un peu plus en annonçant, à propos du "fonctionnaire de police" "mis en examen":

"C'est la victime collatérale du processus judiciaire".

Heureuse formule qui nous rappelle que tout policier suspecté dans une affaire ne peut être que suspecté d'être innocent, ou victime...

L'instruction devrait encore durer trois mois...

Trois mois après lesquels on pourra commencer de songer à organiser un procès, à moins que l'on ne décide de laisser le dossier sombrer en douceur dans l'oubli.

Mais je doute que cela se fasse si aisément: la famille de Pierre ne veut pas oublier.

Elle a fait passer à la presse un rappel des faits, accompagné du texte suivant explicitant les motivations de son action:

Jeudi 4 mars 2010
Communiqué de la famille du lycéen blessé par un tir de flash-ball


Nous avons hâte que cette affaire se clôture. Nous avons besoin d'un procès maintenant pour :

1. élucider les motivations du tireur et de sa hiérarchie ;

2. que la République n'expérimente plus secrètement de nouvelles armes sur des enfants ;

3. pour le Droit de manifester paisiblement sans être mutilé à vie ;

4. pour le Devoir des policiers de ne pas ordonner des violences absurdes et disproportionnées ou à ne pas obéir à ces ordres.

Nous sommes loin de l'exigence d'un procès pour obtenir "réparation" du préjudice causé par le tireur cagoulé, que certains posent en "victime" du devoir.

Nous sommes loin aussi du "débat" politicien ou politicard sur les demandes sécuritaires...

D'ailleurs, les politiques n'ont pas réagi à cette mise en examen.

Ils sont bien trop occupés à réviser la liste des tarifs des transports publics...


Guy M
http://escalbibli.blogspot.com/2010/03/deux-ans-trois-mois-et-quelques-jours.html

PS: Rappel.

Le blogue "27 novembre 2007" tient à jour les informations sur cette affaire et les affaires analogues.


http://27novembre2007.blogspot.com/

Mise en examen du policier tireur



Le policier incriminé dans le tir qui a grièvement blessé Pierre est désormais MIS EN EXAMEN par un avis notifié du Juge d'instruction Jacky Coulon en date du 26 février 2010.

C'est le satisfaisant épilogue d'une première phase dite "d'information". Il a fallu 2 ans et 3 mois pour l'atteindre.
Ce n'est que le début d'une deuxième phase d'instruction à l'issue de laquelle Pierre et les parties civiles demandent la tenue d'un procès.

En fin de cet article, les réactions dans la presse
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jeudi 4 mars 2010
Communiqué de la famille du lycéen blessé par un tir de flash-ball

Nous avons hâte que cette affaire se clôture. Nous avons besoin d'un procès maintenant pour :
  1. élucider les motivations du tireur et de sa hiérarchie ;
  2. que la République n'expérimente plus secrètement de nouvelles armes sur des enfants ;
  3. pour le Droit de manifester paisiblement sans être mutilé à vie ;
  4. pour le Devoir des policiers de ne pas ordonner des violences absurdes et disproportionnées ou à ne pas obéir à ces ordres.
Nous vous prions de recevoir le communiqué ci-joint et de bien vouloir joindre notre avocat maître Franck Boëzec au 02 40 73 58 78 pour tout renseignement supplémentaire

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Rappel des faits
  • La manifestation du 27 novembre 2007 contre la loi dite "Pécresse" rassemblait quelques centaines de manifestants en grande majorité lycéens mineurs, dans l'enceinte du rectorat de Nantes, comme avant elle, au même endroit, de très nombreuses autres manifestations au cours des dernières années.
  • Pierre, gravement blessé à l'œil lors de cette manifestation par le tir volontaire d'un policier (lanceur 40 mm) était alors un mineur âgé de 16 ans.
  • Ce tir de lanceur 40 mm à visée au visage est un tir volontaire de la part d'un policier cagoulé, reconnu comme excellent tireur, avec une arme en cours d'expérimentation par les forces de police.
  • Lors de l'évacuation de l'enceinte du rectorat par les forces de police, les membres de la Brigade Anti Criminalité (BAC) se sont comportés de manière extrêmement agressive et provocatrice envers des manifestants qui reculaient et évacuaient concrètement l'enceinte.
  • Quelques jets à faible intensité de petits projectiles ont eu lieu après que les grilles de l'enceinte évacuée aient été fermées par les forces de police, et sans créer aucun blessure selon les rapports médicaux.
  • En utilisant des tirs de flashball et de lanceur 40 mm, les forces de police ont agit avec une disproportion flagrante à des manifestants déjà hors de l'enceinte du rectorat alors évacuée. Ces tirs sont en contradiction flagrante avec les directives et notes de service du ministère de l'intérieur quand à l'utilisation de telles armes (pas de tirs au visage et pas dans le cadre du "maintien de l'ordre").
  • Dans le cadre de cette instruction, le rapport IGPN et l'expertise balistique organisent l'incertitude sur les faits, avec des réponses dilatoires, très approximatives et partielles aux questions posées.
  • Le temps de l'instruction se dilate, les pièces demandées n'arrivent pas aux parties civiles, les délais de réponses sont largement dépassées, et ce alors même que les blessés graves par tirs de flashball de la part de policiers se sont multipliées.
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Dans la presse

• Reportage FR3 Estuaire avec interview de l'avocat Franck Boëzec - jeudi 0 mars 19 h 00

• Reportage France Bleu Loire Océan - vendredi 5 mars 8 h 00

• PRESSE-OCEAN / Dernière minute Nantes 19:41 - jeudi 4 mars 2010
Affaire du flashball : un policier nantais mis en examen
Un policier nantais a été mis en examen cet après-midi, à Nantes pour "violence avec arme et ITT de plus de huit jours". Après deux ans et demi d'instruction, le juge a estimé que le fonctionnaire avait commis un délit. Lequel ? Celui de blesser à l'œil un lycéen de 17 ans en faisant usage de son flashball lors d'une manif agitée qui se déroulait devant le rectorat, en novembre 2007, à Nantes. "Le collègue n'a fait qu'exécuter des ordres", réagit un policier nantais, à l'annonce de cette mise en examen. "On va sur une manif et l'on ne nous donne pas les moyens de répondre aux attaques… On ne peut pas travailler dans ces conditions !", a-t-il ajouté. "Le flashball est une dotation collective dans le cadre du maintien de l'ordre. L'administration doit prendre ses responsabilités !"
• OUEST-FRANCE / Dernière minute Nantes 20:53 - jeudi 04 mars 2010
Lycéen blessé au flashball : fin de l'instruction, un policier en examen
Un juge d'instruction nantais a indiqué ce jeudi soir que l'enquête ouverte pour « coups et blessures volontaires » sur un lycéen de 17 ans qui a perdu l'usage d'un œil était « achevée ». En novembre 2007, le jeune homme avait été touché par un tir de flashball lors de la dispersion d'une manifestation devant le rectorat de Nantes. Une information judiciaire contre X avait été ouverte. Elle vise désormais un policier mis en examen pour violences volontaires par personne dépositaire de l'autorité publique. Les parents de la victime espèrent maintenant un procès pour « élucider les motivations du tireur et de sa hiérarchie ». Ils plaident pour le « devoir des policiers de ne pas ordonner des violences absurdes et disproportionnées ou à ne pas obéir à ces ordres ».
• LEMONDE.FR | 05.03.10 | 06h57 • Mis à jour le 05.03.10 | 09h16
Un policier nantais mis en examen pour "violence avec arme"
Un policier nantais a été mis en examen, jeudi 4 mars, à Nantes, pour "violence avec arme et ITT de plus de huit jours", selon Presse Océan. L'affaire remonte au 27 novembre 2007, quand une manifestation d'étudiants et de lycéens contre la loi Pécresse donne lieu, à Nantes, à des affrontements avec la police qui avaient fait plusieurs blessés, dont un lycéen de 17 ans gravement atteint à un œil par un tir de Flashball. Après deux ans et demi d'instruction, le juge a estimé que le fonctionnaire avait commis un délit.
"Le collègue n'a fait qu'exécuter des ordres", réagit un policier nantais, à l'annonce de cette mise en examen, rapporte Presse Océan. "Le Flashball est une dotation collective dans le cadre du maintien de l'ordre. L'administration doit prendre ses responsabilités !" souligne ce policier.
• L'Express.fr / Par Reuters, publié le 05/03/2010 à 07:57 - mis à jour le 05/03/2010 à 11:30
Un policier mis en examen pour une blessure au flash-ball
NANTES - Un policier a été mis en examen pour avoir grièvement blessé un lycéen avec un "super flash-ball" en 2007 à Nantes lors d'une manifestation contre la réforme des universités, rapporte l'avocat des parents de la victime.
Un policier a été mis en examen jeudi soir pour avoir blessé grièvement avec un flash-ball un lycéen de 17 ans en 2007 à Nantes, lors d'une manifestation contre la réforme des universités. (Reuters/Charles Platiau)
Le fonctionnaire a été mis en examen pour "violences volontaires avec arme par personne dépositaire de l'autorité publique", a précisé Franck Boëzec à Reuters.
Il disposait jusque-là du statut de simple témoin assisté dans l'enquête du juge d'instruction, en passe d'être close.
Le 27 novembre 2007, lors de l'évacuation du rectorat de Nantes occupé par des manifestants, le policier cagoulé avait tiré sur la tête du jeune homme de 17 ans avec un "lanceur de balles de défense", un "super flash-ball" alors en expérimentation, réputé sept fois plus puissant qu'un pistolet à balles en caoutchouc ordinaire.
Le lycéen a perdu depuis l'usage de son oeil droit.
"La responsabilité de la hiérarchie policière et préfectorale est écrasante dans ce dossier", a dit Luc Douillard, père de la victime. "La mise en examen du tireur était nécessaire, mais d'autres doivent maintenant suivre".
En mars 2009, un étudiant de 25 ans avait également été grièvement blessé à l'oeil par un tir de flash-ball lors d'une manifestation à Toulouse (Haute-Garonne).
Un accident similaire quatre mois plus tard à Montreuil (Seine-Saint-Denis) lors de l'évacuation d'un squat, avait relancé la polémique sur l'usage de ces armes dites non létales.