jeudi 28 octobre 2010

Cour d'appel de Rennes : délibérés renvoyés au 3 novembre

Mercredi 27 octobre, deux affaires de fin de manifestations nazairiennes étaient plaidés à la cour d'Appel de Rennes.

Fabrice, archiviste contractuel à la DRAC, par visio-conférence, faisait appel de sa mise en détention. En effet, ayant refusé la comparution immédiate afin de pouvoir préparer sa défense, F. a été mis en détention provisoire. Son avocat a alors mis en route deux procédures : une demande de mise en liberté jugée au tribunal de Saint Nazaire le 26 octobre qui a été refusée et une procédure d'appel. La plus grande partie de l'audience s'est faite sur la forme. Il s'agissait de discuter de la recevabilité de l'appel, celui-ci n'ayant pas été fait dans les délais. Il s'agit d'une question d'interprétation du droit et de la différence entre un appel sur la mise en détention et un appel sur un refus de mise en liberté. Malgré les doutes sur la recevabilité, l'avocat a tout de même été autorisé à plaider sur le fond. Il a ainsi présenté toutes les garanties que son client pouvait donner pour rendre caduque la nécessité de son maintien en détention. Il restera en prison au moins une semaine de plus dans l'attente de la décision de la cour.

Jérôme, cheminot, faisait lui appel de son jugement. L'audience a débuté sur une lecture détaillée de l'ensemble du dossier par le président de la cour.

Réquisition de l'avocat général:

Trois questions auxquels le juge devra répondre :

1) Etait-ce un attroupement, un rassemblement ou une manifestation? Réponse de l'avocat général : le PV évoquant des jets de projectile atteste d'un attroupement.

2) J., a-t-il participé? Réponse de l'avocat général : oui, puisqu'il dit avoir relancé les lacrymos reçues.

3) Etait-il porteur d'armes? Réponse de l'avocat général : le PV de M. P., de la BAC, est sans équivoque à cet égard, puisqu'il affirme que J. a dit avoir lancé des pavés sur les flics.

"La réalité des faits, c'est exactement celle-là" a-t-il conclu demandant la confirmation de la peine.

Plaidoirie de Maitre Lemoigne, avocat de Jérome :

Il a commencé par rappeler que le jugement de Saint Nazaire a été rendu après seulement 5 minutes de délibéré pour 3 manifestants. Par ailleurs, le jugement manque de motivation, basé sur des impressions et non des preuves. Il s'agit donc d'une "mascarade de justice" et demande l'annulation du jugement.

Il revient sur la question des sommations : le seul moyen d'attester qu'elles ont été faites selon les règles est le PV de la Police, or ce PV est plus que laconique à ce sujet car il ne précise pas la procédure. Il rappelle la jurisprudence : annulation de jugement obtenu car l'infraction n'est pas constituée si les sommations ne sont pas réglementaires. Il souligne par ailleurs la complexité du cas : au même moment devant la sous-préfecture, une partie de la manifestation était licite, l'autre non(les lanceurs de projectiles).

Or, J. n'a pas lancé de projectiles. Il a relancé des goupilles de grenades lacrymos que la police avait lancé. Maitre Lemoigne conteste alors la caractérisation comme armes de ces goupilles. D'une part, il rappelle ce qu'est une goupille (5cm de diamètre, 2mm d'épaisseur – en plastique) pour en contester la dangerosité. D'autre part, il souligne que considérer les goupilles comme des armes par destination reviendraient à dire que la police approvisionne les manifestants en arme.

Maitre Lemoigne revient ensuite sur le problème que pose un réquisitoire basé sur l'exemplarité (rappel de la réquisition du procureur à Saint Nazaire). Il souligne également qu'une circulaire du parquet demande des films des manifestations pour s'assurer de la culpabilité des prévenus, or, J. ne figure pas sur ces films. La culpabilité de J. repose donc sur la seule déclaration de M. P., où figure une description très floue (qui pourrait me correspondre, indique l'avocat). Cela semble bien insuffisant pour le juger coupable d'autant qu'il a toujours nié avoir jeté des pavés, parce qu'il est innocent.

Après avoir remis une pétition demandant la libération de J. (plus de 9000 signatures), Maitre Lemoigne interroge sur le chemin tout tracé de la justice à Saint Nazaire : une manifestation, des gardes à vue, 3 ou 4 comparutions immédiates et au bout des condamnations à la prison ferme avec mandat dépôt.

Ces peines constituent pour l'avocat une prise en otage de la défense, car compte-tenu des délais de procédures et des remises de peine, faire appel fait courir aux détenus le risque de rester enfermés plus longtemps que s'ils acceptent le jugement.

Maitre Lemoigne réitère la demande d'annulation du jugement et demande la levée du mandat de dépôt immédiate au cas où le délibéré serait différé.

J. ajoute que s'il était bien présent à la manifestation, il n'a pas pour autant commis de violences.

Le mandat de dépôt n'a pas été levé, le délibéré sera rendu le 3 novembre, jour de la sortie prévue de Jérôme !

 Codelib, 28/10/2010

NB : plusieurs cars aux départs de Nantes et de Saint-Nazaire avaient été programmés par la CGT pour se rendre devant la cour d'appel. Plusieurs membre du Codelib en était. Des rennais avaient également pris l'initiative d'une manifestation de soutien devant le Tribunal. Pour les personnes présentes, il s'agissait bien de soutenir l'ensemble des personnes poursuivies et condamnées à Saint-Nazaire, et pas uniquement un syndicaliste de la CGT, comme le laisse entendre la presse du jour, qui manifestement n'a pas entendu que le slogan repris était "libérez nos camarades" !

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